2006 THE GREAT COLD DISTANCE ... EXQUIS MOTS DE GLACE ...

Tourmenté, à fleur de peau, The Great Cold Distance est un album qui sème le doute là où d’autres s’évertuent à répandre la tempête. Explorant sans scrupule les plaintes et inquiétudes de l’âme humaine, Katatonia intrigue le sombre de son rock tantôt d’élégances rythmiques, tantôt de lignes de chant étonnamment limpides. Il faut dire que les suédois sont passés maîtres dans l’art d’accommoder le spleen à leur dark métal original. Désigné gothique par la majorité, le métal délivré ici palpite d’un autre sang, d’une mélancolie lasse de trop de questions. Rendez-vous des mots qui se glacent, mélange de métal atmosphérique et de pop dépressive, ce disque de plomb se joue autant des ambiances que de nos états âmes. Difficile d’échapper à ce disque, tant le fond de l’air effraie.

Guitares puissantes mais peu agressives, nuances, contre temps, Katatonia aime les contrastes et nous offre une descente en tristesse libérée de toute précédente apesanteur. Atmosphériques avant tout, la plupart des titres conjuguent grâce et gravité au travers d’une rythmique assurée par la communion de guitares assassines. Malgré quelques relents de sérénité ici et là, on est bien face à un album qui ne contourne pas son rock pour en faire un objet de consommation généraliste. En 12 titres à qualificatifs torturés, Katatonia traverse toutes les époques de la mélancolie sur les lignes de basse d’un Mattias Norrman magnifiquement mis en valeur par une production pleine de finesse. Plus accessible que ces prédécesseurs, ce disque d’ambiances froides contient autant de riffs que d’empreintes mélodiques inoubliables, tels les excellents Leaders, Delibération et l’objet unique My Twin dont on ne peut se lasser.

Bien qu’il soit d’une structure complexe, The Great Cold Distance est exactement le type d’album dont il faut se méfier tant notre addiction est forte après quelques écoutes. Parcouru de sons et de solos lointains, sublimé par la clarté de chant de Jonas Renkse, résonnant d’une charge rythmique imposante, ce nouvel opus s’enivre à mélanger les contraires pour finir par nous captiver totalement. Se risquant en refrains imparables et lenteurs de guitares saturées, certains titres ne cachent pas leur émotion toute personnelle alors que d’autres nous accorde le bénéfice du doute. Jamais facile, le rock produit ici ne fait pas de caprices et quand les guitares grondent, elles grondent. Dépressif baigné d’effets inattendus, l’album lorgne souvent du côté d’un métal plus classique qu’on ne l’aurait cru, ce qui ne l’empêche pas de nous offrir quelques accalmies d’arpèges.

Un très beau disque à écouter assis à l’ombre d’une incertitude.

Starchild  29/04/2006    avis: